« on: June 11, 2013, 01:00:19 AM »
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Re: [alpha]PERSPECTIVE – TURQUIE - la politique étrangère de l'AKP
Publié le 18-10-2012 17:00 GMT
Email-ID 73390
Date 02-06-2011 19:04:18
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Mes commentaires ci-joint
Le 01/06/2011 17h02, Michael Wilson écrit:
PUBLICATION: historique/analyse
ATTRIBUTION: n/a
DESCRIPTION de la SOURCE:
Chef de la branche DC de SETA, principal groupe de réflexion de l’AKP;
grand sympathisant de l’ AKP, proche de Davutoglu
Crédibilité : B
CREDIBILITE DE L’INFORMATION : 2-3
DISTRIBUTION: Alpha
CONTRÔLEUR de la SOURCE: Reva
Je reviens à l’instant d'un déjeuner qui a duré près de 3 heures avec cette source turque. Il dirige le principal groupe de réflexion de l'AKP [ndt : Adalet ve Kalkınma Partisi : Parti pour la justice et le développement] pour le SETA de DC*, et est le représentant de la politique étrangère de la Turquie aux Etats-Unis. Lui et Davutoglu sont proches (la source prend toujours la défense de Davutoglu et pense que (notre) George et D sont des âmes sœurs) et vient juste de rentrer d'Ankara, où il a beaucoup travaillé avec Davutoglu. SETA est l’objet d’une importante expansion en ce moment. Au lieu d'être simplement un groupe de réflexion turc, ils sont en train de le transformer en un groupe de réflexion régional avec des bureaux au Caire, à Bruxelles et à Moscou (qui s’ajoutent aux deux de Washington et Ankara.)
L’AKP injecte énormément d’argent dans l’institut, essayant de le renforcer pour en faire une extension de la politique étrangère du gouvernement. Ayant moi-même été impliqué dans un important projet visant à développer un groupe de réflexion il y a quelques années, je sais que c'est une entreprise financière énorme! Même pour un seul bureau, et à présent il s’agit de passer de 2 à 5. D’où viennent les fonds? Ils ne peuvent sans doute pas utiliser les moyens financiers de l'Etat. L’AKP et Gülen disposent de fonds limités qui sont réservés aux dépenses de fonctionnement et aux projets en cours. Ou bien l’argent provient d’hommes d'affaires turcs pro-AKP ou bien de sources Khaleeji [ndt : Golfe Persique] qui partagent leurs idées.
(Parenthèse - j'ai demandé pourquoi à ces endroits-là ; il m’a répondu que la Turquie ne veut pas être établie dans le Caucase afin de ne pas «offenser » la Russie dans sa périphérie; Le Caire est une bonne option parce que cela permet à la Turquie de se mettre à la portée du monde arabe, l'Afrique du Nord en particulier; La Turquie peut facilement être en contact avec l’Irak depuis Ankara et SETA ne veut pas être considéré comme une agence de renseignements dans ces pays). Le Caire a été choisi parce que C’EST LE LIEU où les Turcs (en particulier l’AKP) veulent étendre leurs activités en accord avec leur politique étrangère et également pour des raisons historiques.
Ils pensent maintenant que la transition vers un système politique multipartite est une opportunité à saisir. Il y a beaucoup à y gagner en utilisant leur influence pour façonner les différents courants de pensée. Je me souviens qu’il n’y a pas si longtemps, Gamal Moubarak a dit que l'Egypte est prête à accepter la Turquie en tant qu’acteur régional majeur, mais pas l'Iran. Dans le secteur civil égyptien, beaucoup voient la Turquie comme un modèle de développement politique où islamistes et laïques peuvent coexister dans un cadre politique. De la même façon, durant la période post-Moubarak , l'armée égyptienne va regarder du côté de la TSK [ndt :Turkish Armed Forces : l’armée turque] pour voir comment elle a pu guider le processus démocratique.
De plus, en étant basé au Caire, on peut avoir une très bonne idée des courants géopolitiques qui traversent le monde arabe. L'Egypte est en voie de devenir le principal interlocuteur concernant la question israélo-palestinienne. Cela va également contribuer à atténuer les tensions découlant du fait que ni l'Egypte ni le monde arabe ne veulent d’une hégémonie turque. Donc, il y a beaucoup d’avantages à être installé dans la capitale égyptienne. Bruxelles est un choix logique en raison des relations avec l'OTAN. Il faut également se souvenir qu’une affiliation à l'OTAN va imposer des limites à une politique étrangère indépendante turque. Donc, l'AKP va vouloir comprendre comment faire face à cette situation. Leur présence à Bruxelles va les aider à réfléchir à l'OTAN. C’est beaucoup mieux que d'avoir un bureau à Londres, Paris ou Berlin. Moscou, ce n'est pas seulement parce qu'ils ne veulent pas faire chier les Russes en ouvrant un bureau dans le Caucase. Le Kremlin est une grande puissance à qui les Turcs auront toujours à faire. Par ailleurs, l’Etat turc, l'AKP, SET, tous ont une présence considérable à Bakou. Et puisque le bureau d’Ankara s’occupe de l'Irak, il peut également s’occuper du Caucase. Ce qui serait intéressant, c'est de découvrir quels sont leurs liens avec l'Iran. Il y a des groupes de réflexion en Iran et je suis pratiquement certain qu’il y a des relations entre ces derniers et SETA.
La Turquie, plus précisément l'AKP, se surmène en ce moment. Davutoglu dit que c’est étourdissant, mais que la Turquie doit saisir l’opportunité qui vient de s’offrir à elle. Auparavant, par exemple, il était très difficile pour la Turquie d’étendre son influence en Afrique du Nord. L’AKP n'avait pas de bonnes relations avec l'Egypte, pratiquement rien avec la Tunisie, etc. Maintenant, tout s’ouvre. SETA a organisé toutes sortes de conférences – plus spécifiquement sur les islamistes «réformés» - pour les groupes de l'opposition, dans presque tous les pays arabes. Certains de ces évènements doivent être gérés avec le Centre pour l'étude de l'Islam et de la démocratie [CSID], auquel je suis affilié.
Le CSID travaille avec DoS [United States Department of State], NED [National Endowment for Democracy], USIP [United States Institute for Peace], CIPE [Centre for International Private Enterprise], et d'autres entités similaires de Washington DC. L'accent est mis sur les éléments post-islamistes qui partagent la position idéologique de l'AKP au niveau de l'interaction entre la religion et les affaires publiques. Ils les amènent à Ankara, leur font visiter des ministères, leur font observer les travaux parlementaires, leur enseignent la gouvernance, etc.(Ils ne font pas de publicité, mais la source a déclaré que le NED a financé une de ces conférences avec un institut jordanien et a demandé à ce que la Turquie soit aux commandes.) Tout cela dure depuis un certain temps. En 2006, je faisais partie du comité d'organisation impliquant SETA et l’Institut international de la pensée islamique qui a organisé une conférence sur la Sécurité, Démocratie et Gouvernance.
À l'époque, il y avait juste le bureau SETA à Ankara. Le nombre d’activités menées depuis lors a énormément augmenté. Les forces intérieures de la sécurité turque forment les forces de sécurité dans des pays comme la Syrie, pour leur apprendre à gérer la désobéissance civile (par ex. : ne pas tirer sur les manifestants). La préférence naturelle de l'AKP est de cultiver une opposition islamiste modérée ou «réformée» dans ces pays, la Turquie servant de modèle. Il est dans l'intérêt de la Turquie (AKP) d'aider les forces islamistes modérées à se diriger vers le post-islamisme. Cela les aide à contrôler les islamistes dans la région ainsi que les Etats arabes. Cela leur permet également de pouvoir dire aux Etats-Unis : laissez-nous gérer cela à votre place. La Syrie sera difficile parce que là le MB [Muslim Brotherhood : parti des Frères musulmans] n ‘est pas structuré : c'est principalement une entité exilée. L’Égypte sera beaucoup plus facile, surtout avec la jeune génération du MB, désireuse d'imiter l'expérience post-islamiste de l'AKP.
L'attitude de la source sur cette question est quelque chose que j'ai souvent remarqué lorsque j'étais en Turquie. C'est cette attitude de «tous les Arabes veulent être comme les Turcs » dans la région. Les Arabes sont perçus comme étant arriérés, et si vous en parlez aux militaires turcs, ils sont considérés comme étant sales, même pas dignes d’attention. Mais l'AKP dit que puisque nous avons un lien islamiste, nous pouvons faire tomber les barrières entre la Turquie et le monde islamique, nous POUVONS travailler avec eux, faire des affaires avec eux, leur apprendre à gouverner démocratiquement et mettre leurs forces armées sous contrôle civil, mais ils seront toujours inférieurs à nous. Comme il le dit lui-même, tout ce Printemps Arabe sera un Printemps turc, ce qui signifie que la Turquie va transformer le Printemps arabe selon le modèle de l’AKP et ils en seront tous reconnaissants. Cette dynamique est beaucoup plus nuancée. Cette idée que les Arabes sont arriérés est un sentiment très partagé en Asie du Sud et en Perse plutôt qu’en Turquie. Il existe en Turquie, mais parmi la vieille garde kémaliste étant donné que le mouvement d’Ataturk était basé sur un rejet de l'héritage religio-culturel arabe. Ceci étant dit, dit, il y a eu beaucoup de contacts entre les peuples turcs et arabes en raison de fréquents voyages allers et retours, ce qui a contribué à changer les attitudes. Nous devons garder à l'esprit que, du côté arabe, il y a également un mépris historique pour les Turcs qui étaient considérés comme Isti'maar (impérialistes) suite aux 4 siècles de domination ottomane, qui a finalement pris fin avec l'alignement entre les Arabes, les Britanniques et les Français durant la Première Guerre Mondiale. C'est attitude arabe s’est également tempérée au fil des décennies.
L'islamisme a en effet joué un rôle clé en éliminant ces attitudes, mais le lien islamique a également été ravivé par l’augmentation de la religiosité en Turquie et dans le monde. A ne pas confondre avec le pan-islamisme, qui est une tendance politique. Il y a aussi la diversité au sein du monde arabe qui façonne cette relation naissante.
L'Arabie Saoudite et les États du CCG [ndt : Conseil de Coopération du Golfe] ne regardent pas la Turquie, par exemple, de la même manière que l'Egypte, l'Irak et les Etats arabes du Levant. Les Turcs sont peu susceptibles d'être capables de jouer le rôle de Big Brother de manière significative en raison de ces différences. Le fait que les Etats qui peuvent y prétendre n'ont pas été balayés, plus le fait que nous voyons un processus évolutif du changement dans la région, signifient que la Turquie devra naviguer avec précaution entre les États et les acteurs non étatiques, notamment les islamistes modérés.
L’AKP n'a pas vraiment de liens étroits avec Ikhwan (MB) dans ces pays, Gülen non plus, mais ils travaillent à la construction de ces liens en ce moment. Ce n'est pas vraiment exact. L’AKP et le MB ont des liens historiques de longue date (cela remonte à l'époque où l'ancien mentor de Erdogan / Gul, le regretté Necemittin Erbakan, avait lancé son premier parti politique à la fin des années 60, début 70), mais indirectement. Je fais partie de ce réseau informel international d’islamistes modérés et post-islamistes qui s'étend de l’Indonésie / Malaisie à l’Amérique du Nord et des régions musulmanes russes à l'Afrique.
Les partis MB égyptiens et syriens (c’est un peu différent pour la Jordanie) ont longtemps été verrouillés par leurs gouvernements respectifs, et l'AKP et ses prédécesseurs, le Fazeelat et le Refah, etc ont été verrouillés par l’armée turque. Mais ils communiquaient via la diaspora occidentale du MB et de ses alliés. Donc, oui, bien que des liens structurels ne soient pas présents, (tout comme pour les MB dans les pays arabes), des liens généraux et forts existent. Une autre source à qui je parlais l'autre jour (un ancien Guleniste) m'a expliqué les grandes différences idéologiques entre le Mouvement Gulen et le MB, pourquoi les Gulenistes ne sont pas avec d'accord avec Sayyid Qutb sur la ligne de pensée de l'islam politique et pourquoi les islamistes devraient rester en dehors de la gouvernance.
Encore une fois, c’est une vision très simpliste des choses. Tout d'abord, Sayyid Qutb est un individu extrêmement mal compris, notamment parce qu’il a été dépeint comme étant le parrain idéologique d'Al-Qaïda dans le monde post-9/11. Deuxièmement, la pensée de Qutb constitue l'un des nombreux volets du MB. Troisièmement, Qutb est un phénomène passager en ce qui concerne le MB. Le MB est beaucoup plus proche de l'AKP que ce que l’on veut bien admettre en général, en particulier chez les jeunes et les jeunes générations qui poussent l'AKP comme un modèle à imiter. Il a m'expliqué comment ils étaient bien dressés dans leur jeunesse par les mentors Gulenistes et comment ça a créé un grand obstacle idéologique entre le mouvement et le MB (remarque : le MB n'a jamais existé en Turquie.) Faux. L’AKP est le successeur des homologues turcs du MB. Les conditions politiques en Turquie ainsi que les états arabes les ont évidemment façonnés différemment.
Les islamistes turcs ont évolué beaucoup plus rapidement à cause de la laïcité et à cause de la démocratie alors que les partis MB sont restés tels quels à cause du socialisme autoritaire des États arabes. Il faut aussi rappeler que Gulen est un rejeton du mouvement originel islamiste turc. Les partis Saadet ou l’AKP n’en font pas partie. On peut discuter du fait que cette aversion de « l’Islam politique » par les Gulenistes n'est pas aussi forte qu’avant étant donné que les Gulenistes s'appuient sur l’AKP comme véhicule politique principal et vous-même avez 2 Gulenistes en course dans la prochaine élection turque à Istanbul. Techniquement, Gülen est un mouvement social donc non- islamiste.
Jusqu'à présent, il s'est appuyé sur l’AKP pour infiltrer le parti et les autres secteurs de l'Etat en passant par la petite porte. Je suis certain que ce n'est pas la première fois que les Gulenistes sont en lice pour des élections. Il y a beaucoup de AKPites qui sont Gulenistes. Cette fois, la différence est peut-être que ces gars peuvent être une indication que l’AKP et ses alliés encouragent les groupes d'opposition islamistes dans ces pays qui émergent du Printemps Arabe et veut les modeler à son image avec un Islam modéré (vous pouvez imaginer comment cela pourrait considérablement compliquer les choses avec Israël et les États-Unis.) Je ne pense pas que les Etats-Unis et Israël seraient totalement opposés à cela. Ils n'ont pas vraiment le choix en la matière. Ainsi, de leur point de vue, il est préférable d'avoir à faire à des islamistes à la turque plutôt que
des styles Arabes ou d'Asie du Sud. Je sais que l'administration Obama le voit certainement de cette manière et je crois aussi que les Israéliens sont trop intelligents et les mieux placés pour s'en rendre compte.
La source dit que la Turquie met une énorme pression sur la Syrie pour qu‘elle s'engage dans de véritables réformes. Ce n'est pas que l'AKP cherche à renverser Assad, mais ils considèrent que la suppression de l’opposition par le régime syrien pose un plus grand risque sécuritaire. Il m’a dit qu’un nombre croissant de PKK viennent de Syrie, et que les politiques de la Syrie envers ses Kurdes mènent à la radicalisation, ce qui crée des problèmes de sécurité pour la Turquie. Les Turcs savent que le régime va tomber s’il ne change pas de direction. Ils ne veulent pas que cela se produise. Comme je l’ai déjà dit, l'opposition syrienne n'est pas dans une position où les Turcs peuvent la soutenir afin de remplacer le régime al-Assad. Le cauchemar turc est d’avoir une Libye à leur porte et sont donc frustrés par le manque de coopération des Syriens pour éviter un effondrement potentiel. Le deuxième discours de Bachar a été écrit par les Turcs. L’AKP était derrière la politique sur la citoyenneté des Kurdes, et Bachar a écouté. Tu te souviens que j'avais dit que la dernière délégation turque qui s'est rendue à Damas pour discuter de la situation intérieure était composée de fonctionnaires de niveau 2 dont le travail consiste à mettre en place
les actions déjà convenues par les décideurs. Donc, il est logique que la pensée d'al-Assad soit façonnée par les Turcs, l’AKP veut voir plus de vraies réformes qui permettent de légaliser l’opposition. C'est pourquoi l’AKP donne une plateforme d’expression aux groupes d'opposition Syriens en Turquie – le but est d’intimider le régime al-Assad et d’établir des liens avec les alternatives à al-l'Assad. Cela ne signifie pas que la politique de transition va se produire du jour au lendemain, mais la Turquie tente de pousser le régime à s'émanciper politiquement afin de s’ouvrir à la concurrence et à d'autres groupes politiques, comme le MB. (c’est principalement le groupe SETA qui s’est impliqué dans l'organisation de ces conférences avec l'opposition syrienne.)
Il dit que les Etats-Unis poussent la Turquie à faire encore plus pression sur la Syrie, et que la pression vient d'en haut. La Turquie proteste en disant qu’ils veulent décider de la manière dont ils traitent avec la Syrie et qu'ils ne veulent pas pousser le régime syrien à bout.
L’AKP veut aider l’Égypte à prendre de l’essor dans la région. Ce n'est pas que la Turquie considère l’Egypte comme un concurrent sérieux, mais si l'Egypte pouvait se démerder sous la tutelle turque, cela permettrait à la Turquie de mieux gérer la région, en particulier le contrôle et la réforme du Hamas, face à la Libye, la Tunisie, etc. (Il est intéressant de noter que les Turcs pensent déjà dans ce sens – au moment où les États-Unis se tournent vers la Turquie pour partager le fardeau, la Turquie est déjà à la recherche de mandataires pour partager le fardeau au sein de la région.) Les choses vont très mal se passer si les militaires égyptiens ne tiennent pas les promesses faites lors des élections. La Turquie veut s’assurer que l'opposition, en particulier le MB, a assez de place pour se développer. Peu importe si cela ne plait pas à Israël - c'est leur problème.
Il a beaucoup exprimé sa frustration tout au long de la discussion - que les Etats-Unis considèrent toujours la Turquie comme un subalterne, et lui dit «Fais ceci » ou « Fais cela» en matière de politique étrangère. L'AKP n'aime pas être traité de cette façon, ce qui a comme résultat de créer un grand nombre de litiges lorsque les responsables turcs et américains se rencontrent.
Davutoglu estime que les questions de sécurité dans la région du golfe persique sont exagérées, et que les Etats-Unis jouent de la fracture arabo-perse en essayant d’obtenir de la Turquie qu’elle fasse quelque chose. Du point de vue de l'AKP, la question
est «Que voulez-vous que nous fassions? » L'AKP veut calmer le conflit sectaire, et non pas l'aggraver en prenant ouvertement position et en présentant l’Iran comme le grand méchant loup.
La discussion s’est alors élargie pour aborder le discours « zéro problèmes avec les voisins » de Davutoglu . La source a expliqué que beaucoup de gens pensent que cette politique étrangère est naïve, mais il dit que Davutoglu n'est pas aussi naïf qu’il n’y paraît. Peut-être que c’est un universitaire, mais il est rusé. Il sait qu'il a des problèmes avec ses voisins, mais à son avis, il n’est pas dans l’intérêt de la Turquie d’aborder ces problèmes de vive voix et de considérer certains de ses voisins comme des rivaux. Si la Turquie dit à ses voisins que l’objectif de sa stratégie est de résoudre ses problèmes et de supprimer les conflits, alors elle pourra travailler avec eux d’une manière plus efficace. C’est la démarche qu’elle a adopté avec l'Iran, la Russie, etc, en évitant ainsi la confrontation. Il dit qu’en surface, la Turquie ne prendra pas de mesures agressives contre l'Iran, mais en attendant, bien sûr, l’AKP va encourager les sunnites en Irak.
J'ai répliqué qu’il suppose que les événements autour de la Turquie auront lieu selon le calendrier de la Turquie et lorsque la Turquie sera prête à faire face à ces problèmes - le monde ne fonctionne pas de cette façon. Lorsque des problèmes iront à l’encontre des intérêts de la Turquie, la Turquie devra répondre d'une manière ou d'une autre, même si ce n’est pas du «bon voisinage». Dans l'ensemble, l'impression que j'ai est que les gars de la politique étrangère de l'AKP sont encore sous l'impression que cette doctrine de politique étrangère de Davutoglu est toujours la meilleure façon de s'y prendre pour la conduite de la politique étrangère. Organiser l’ordre de priorité des intérêts de politique étrangère n’est pas une préoccupation. La Turquie semble encore être en train de courir partout en essayant d'éteindre les incendies tout en saisissant des opportunités, mais manque encore cruellement de discipline et de direction. Ce que Davutoglu comprend, selon la source, c’est que, pour la Turquie, la meilleure façon d’apprendre c'est en faisant. Apparemment, Davutoglu compare l'expérience de la Turquie aux Etats-Unis de l'après Seconde Guerre Mondiale, quand les Etats-Unis n'avaient même pas une agence de renseignements. Il croit que tous ces développements régionaux vont pousser la Turquie à l'action et forcer la Turquie à apprendre à gérer son voisinage rapidement.
(Parenthèse - Davutoglu ne veut pas que Strategic Depth, son livre de 500 pages, soit traduit en anglais mais il a été traduit en arabe et en russe. J'ai demandé pourquoi, d'autant plus que l'anglais est la lingua franca, n’y aurait-il pas plus de personnes qui comprendraient les choix de la politique étrangère de la Turquie si elles pouvaient lire le livre écrit par le responsable de la politique étrangère ? Il ne veut pas admettre que l'anglais est la lingua franca – Cette forte aversion à reconnaître la puissance américaine est toujours perceptible, ainsi que la volonté de faire valoir la Turquie indépendamment des États-Unis.)
Il pense que l'AKP va connaitre une grosse victoire lors de la prochaine élection. L’établissement séculaire laïque ne peut vraiment pas faire grand chose pour saper leur soutien. Tant que l'économie va bien, l'AKP est en sécurité. Les divisions politiques et idéologiques au sein de la Turquie sont encore très importantes. Ce fut particulièrement évident après la récente tentative d'assassinat contre Erdogan. Il parle avec dégoût du fait que l'armée ne pourrait jamais faire ce que l'AKP a fait au cours de la dernière décennie. Quand les militaires étaient au pouvoir, ils ne se souciaient que d'eux-mêmes alors que l'AKP renforce la confiance entre l'Etat et le peuple. Il a dit que les groupes laïques refusent toujours de traiter avec les pays islamiques. Même quand SETA essaie de tendre la main aux groupes de réflexion laïques, aux associations professionnelles qui ont des projets comme en Tunisie, en Egypte, etc, ils sont rejetés avec le sentiment que les Arabes leur sont inférieurs, nous n'avons pas besoin de travailler avec eux. Il dit (et c'est ce que Davutoglu affirme) que la mentalité de l'AKP est ce qui permet à la politique étrangère turque de se développer.
L'armée n'a pas beaucoup de possibilités pour tenter de saper l'AKP avant les élections. Il a souligné les fuites récentes au sujet de certains retraités de l'armée qui ont eu des contacts avec les dirigeants du PKK, l'allégation étant que l'armée «état profond» tente d'orchestrer des attaques pour saper la politique kurde de l'AKP.
*ndt:la fondation SETA à Washington, DC, est un groupe de réflexion à but non lucratif, indépendant et non partisan basé à Washington, DC, dédié aux études novatrices sur des questions internationales concernant la Turquie et les relations américano-turques au niveau national, régional et international.
« Last Edit: July 05, 2013, 11:52:57 AM by mayya »

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